Consultation

XIX, folios:74 75
Albert, Jean, sieur de Montlehuc, commissaire des guerres
M. de Gordes
Lettre non liée
10/10/1572
Lyon
Die

Transcription

Les mots surlignés font l'objet d'une note

1

Monseigneur, suyvant ce qu’il vous a pleu me commander par votre lectre du vingt septieme du passé,

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j’ay faict interroger les prisonyers detenus en ceste ville et pence n’avoir rien oblyé pour pouvoir

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y descouvrir les complot et entreprises traméez par les nommés en voz precedantes lettres. J’ay tiré d’eulx

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ce qu’est contenu en leurs responces et repetitions. S’il vous plaict les faire veoir, je vous en envoye

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la coppie. Et en attendant ce qu’il vous plairra en ordonner, je les fais tenir serrés le plus fort

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qu’il est possible. Il est vray que l’ung d’eulx rompit lundy dernier la muralhe de la prison

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et par le moyen d’une corde qu’il avoyt faict de ses vestementz dessandit de soir hors

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les muralhes de ceste ville et s’en fuyt. Cela n’est advenu par faute d’estre bien serrés, mais

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il rompit une fenestre ferrée. Je l’ay faict suyvre de tous coustés pour le faire reprandre.

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Monseigneur, ceulx de la relligion de ceste ville ont faict une cotte entre eux pour paier

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les soldatz qui sont icy pour faire la garde pour eux, laquelle est faicte ordinairement

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par les catolicques, desquels le nombre est assez petit, oultre ce que ce sont gentz mal propres

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à ce faire. Car de vingt homes qu’ilz peuvent estre pour chacune garde, on n’y en scauroyt

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trouver plus du tiers qui la puissent supporter, qu’est cause que je ne m’arreste de beaucop

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en eux, mays y employe lesdits soldats, tellement que les affaires y sont manyés de façon

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qu’on n’y veoit que toute obeyssance et devotion au service de sa majesté ; et estime que

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la continuation de ladite cotte occasionera plusieurs de ladite relligion se ranger avec

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les catholicques, comme de faict ung des principaux cytoiens se catoliza dimanche dernier.

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Je desireroys scavoir votre volunté, si je doibz recevoir à faire garde ceulx qui se seront

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catolizés, pour de tant les descharger de leur cotte, bien que je ne me veulhe point

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encores aultrement repozer en eux. Et d’aultant qu’en plusieurs villaiges de ce ressort,

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y a bon nombre de ceux de ladite relligion qui mesmes ont suyvi les dernieres guerres,

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lesquelz on auroyt aussi tost, voyre plus à craindre que ceux de ceste ville. Je m’estois pencé

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les faire contribuer à la paye desdits soldatz, affin de les cognoistre et tenir en plus

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grand crainte ; et m’asseure que par ce moyen plusieurs se randront catolicques.

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Aultrement, veu qu’ilz ne se ressantent de rien, ilz se tiendront tousjours en leurs oppinions

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avec ce que, s’ilz ne sont ung peu vizités comme leurs compagnons, il y pourroyt survenir du

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dangier. Car on faict courir le bruict que du cousté d’Orange se faict quelque remuement,

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duquel desirant scavoir la verité, j’ay envoyé personnaige pour m’en appourter des noveles.

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Or je n’ay rien volu faire de ce que dessus sans vous en advertir pour en recevoir voz

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commandementz, lesquels je suyvray toute ma vye. J’ay faict recercher les armes ausdits

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de la relligion pour m’en tenir saizi. C’est vray que suys en doubte si je doibs saizir leurs

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espées et si doibz permectre aux gentilzhomes de les pourter ordinerement par la ville.

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S’il est trouvé bon par vous, je le feray faire de mesmes aux circonvoysins, car cela serviroyt

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de plus grand asseurance. J’ay sperance, Monseigneur, de tenir si bien la main aux affaires

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que le roy sera tousjours obey et que vous en recevrés entier contantement. Si j’eusse

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pencé pouvoir obtenir congé de vous pour assister à la monstre naguieres faicte à Loriol de la

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[v°] compagnie du sieur Centurion, voyant les affaires bien despozés, je vous en heusse faict

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humble requeste, comme je feroys aujourd’huy pour faire celle des compagnies corses,

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laquelle on dict se debvoir faire dans peu de jours en Dauphiné pour six moys,

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actandu que celluy que y pourra estre commis par vous n’en tirera que quarante

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livres, et moy y estant en auroys pour six payes, ce qui serviroyt à reparer

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ung peu des pertes que j’ay faictes par le passé. Toutesfoys, Monseigneur, […illisible]

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que je vous asseureroys delaisser homme feable et duquel je me randroys [responsable]

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durant mon absance pour ce regard, si ne veux- je pourtant bouger sans veoir

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les affaires et le temps bien à propos, ce que je remectz à ce qu’il vous plaira

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men commander. Vous suppliant, Monseigneur, pour fin de la presente, me

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tenir tousjours au nombre de voz tres humbles et tres obeyssans serviteurs, qui

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pour votre service employera à jamais corps et biens d’aultant bon ceur que je

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supplie le Createur qui vous doinct,

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Monseigneur, en très heureuse santé, très longue et très heureuse vie. De Dye,

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ce Xe octobre 1572,

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Votre très humble et très obeyssant serviteur

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Monleheuc

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